(397) E : La vie et la mort sont deux choses qui se correspondent. La mort est la conséquence de la vie (F : La vie est la porte de la mort, la mort est celle de la vie). Dès que l'homme est sorti de la vie, il entre immédiatement dans la mort. Les anciens disaient : Tous les hommes désirent uniquement de se délivrer de la mort ; ils ne savent pas se délivrer de la vie.
(398) Ce passage a reçu une multitude d'interprétations qui manquent, la plupart, de justesse et de clarté. L'explication de Yen-kiun-ping me paraît seule plausible ; mais elle m'oblige de rendre le mot tou (vulgo disciple, compagnon) par « voie, cause ». Plusieurs commentateurs l'ont expliqué de la même manière par tao . Il y a treize causes de vie, c'est-à-dire treize moyens d'arriver à la vie spirituelle, savoir : la vacuité, l'attachement au non-être, la pureté, la quiétude, l'amour de l'obscurité, la pauvreté, la mollesse, la faiblesse, l'humilité, le dépouillement, la modestie, la souplesse, l'économie. Il y a treize causes de mort, qui sont le contraire des treize états que nous venons d'énumérer, savoir : la plénitude, l'attachement aux êtres, l'impureté, l'agitation, le désir de briller, la richesse, la dureté, la force, la fierté, l'excès de l'opulence, la hauteur, l'inflexibilité, la prodigalité.
(399) E : L'auteur parle ici des hommes du siècle, qui sont passionnément attachés à la vie mondaine et qui ne connaissent pas le Tao. L'expression sing-sing signifie « chercher à alimenter sa vie ». Comment se fait-il qu'en cherchant avidement le bonheur ils trouvent le malheur ? C'est parce qu'ils ne songent qu'à contenter leurs passions et à satisfaire leurs intérêts privés ; ils ne savent pas que plus ils sont ardents à chercher les moyens de vivre, plus ils approchent de la mort.
D : Les monstres des mers trouvent que les abîmes ne sont pas assez profonds et s'y creusent encore des retraites ; les vautours et les aigles trouvent les montagnes trop basses, et ils élèvent encore leur nid au-dessus d'elles ; ni la flèche du chasseur, ni les filets du pêcheur ne peuvent les atteindre. Ils semblent placés dans des lieux inaccessibles à la mort ; mais l'appât de la nourriture les fait sortir des abîmes et descendre des hauteurs, et ils ne tardent pas à périr. De même les besoins de la vie matérielle et le goût effréné des plaisirs, entraînent l'homme à sa perle.
(400) Pi-ching : Un ancien disait : Celui qui aime la vie peut être tué ; celui qui aime la pureté peut être souillé ; celui qui aime la gloire peut être couvert d'ignominie ; celui qui aime la perfection peut la perdre. Mais si l'homme reste étranger à la vie (corporelle), qui est-ce qui peut le tuer ? S'il reste étranger à la pureté, qui est-ce qui peut le souiller ? S'il reste étranger à la gloire, qui est-ce qui peut le déshonorer ? S'il reste étranger à la perfection, qui est-ce qui peut la lui faire perdre ? Celui qui comprend cela peut se jouer de la vie et de la mort.
Liu-kie-fou : Pourquoi l'homme peut-il être blessé par la corne du rhinocéros, par les ongles du tigre, par l'épée du soldat ? Parce qu'il a un corps. S'il sait se dégager de son corps, intérieurement il ne verra plus son corps ; extérieurement il ne verra plus les objets sensibles. La mort ne pourra l'atteindre par aucun endroit.