(392) B : Il gouverne en se conformant aux mœurs du peuple ; il ne froisse point ses affections et règle ses sentiments sur les siens.
(393) Sou-tseu : Il n'a point de sentiments déterminés ; il base ses sentiments sur ceux du peuple. Que les hommes soient vertueux ou dénués de vertu, il les traite tous comme des gens vertueux ; qu'ils soient sincères ou hypocrites, il les traite tous comme des gens sincères (E : Il ne met aucune différence entre eux). Il sait que la vertu ou le vice, la sincérité ou l'hypocrisie résident en eux ; c'est pourquoi ses sentiments ne changent point. S'il en était autrement, s'il traitait les hommes vertueux comme tels, et rejetait les hommes dénués de vertu ; s'il traitait les hommes sincères comme tels, et repoussait les hypocrites, pourrait-on dire qu'il sait constamment sauver les hommes ? C'est pourquoi il ne repousse personne. Dans le monde, les bons et les méchants, les gens sincères et les hypocrites s'approuvent eux-mêmes, tandis qu'ils se calomnient et se déchirent les uns les autres. Le Saint les traite tous de la même manière. Il ne se réjouit point à la vue des bons ; il ne témoigne point de déplaisir à la vue des méchants. De cette manière, les uns (les bons) ne s'enorgueillissent point, les autres (les méchants) ne s'irritent point. Alors tous se convertissent, et le monde commence à goûter la paix.
Littéralement « je le traite, etc. ». Lao-tseu emploie quatre fois le pronom 'ou, « je » avant les verbes regarder comme vertueux, regarder comme sincère. La première phrase m'a engagé à mettre ces verbes à la troisième personne du singulier de l'indicatif. Ce passage a reçu une autre interprétation. B : Si quelqu'un est vertueux, j'imite sa vertu ; si quelqu'un n'est pas vertueux, je l'accueille avec un sentiment de vertu, afin qu'il revienne à la vertu. Si quelqu'un est sincère, j'imite sa sincérité. Si quelqu'un n'est pas sincère, je le traite avec sincérité, afin qu'il revienne à la sincérité.
(394) J'ai suivi E : Tel est son mérite (te ), qu'on peut l'appeler extrêmement vertueux (tchi-chen), extrêmement sincère (tchi-sin).
L'édition B offre la leçon te « posséder », au lieu de te « mérite » : « Il possède la vertu, il possède la sincérité ».
(395) E : Cette expression veut dire qu'il traite les hommes pervers et hypocrites comme s'ils étaient vertueux et sincères, et ne met aucune différence entre eux.
(396) E : Le peuple voyant que le Saint semble ne pas distinguer les bons des méchants, n'en peut sonder le motif et le regarde avec étonnement ; c'est pourquoi il attache sur lui ses oreilles et ses yeux. De son côté le Saint regarde le peuple comme un enfant. Il sait qu'il est dépourvu de connaissance comme un enfant. En effet, un enfant a des vues trop bornées pour comprendre la conduite d'un grand homme. De même le peuple ne saurait sonder et comprendre les voies du Saint.
Aliter B : Le peuple admire les exemples du Saint, il écoute avidement ses paroles, il le contemple avec respect, il a confiance en lui, il l'aime comme un père et une mère. De son côté, le Saint craint de blesser le peuple, il le conserve avec sollicitude et le chérit comme un enfant qui vient de naître.